Avez vous déjà médité sur la perfection d’une toile d’araignée ?
Dans la lumière d’automne, ces chefs d’oeuvre transparents, invisibles, sont magnifiés. Ornés de gouttes de rosée, les rayons concentriques, et les spirales deviennent visibles. Ce sont des tableaux éphémères, tissés à l’aurore ou au crépuscule. Comme pour donner naissance, et pour faire mourir. Une image des cycles de la vie et de la mort. De l’habileté à construire et à détruire.
Au centre de cette toile, appelé « moyeu », les araignées guettent l’arrivée de leurs proies. Ce sont de véritables artistes, qui signent leur identité par la forme, la taille, et la structure choisie. Ce qui est extraordinaire, c’est qu’au sein d’une même espèce, des variations sont observées, au cours du temps et d’une toile à l’autre. Cette mise en oeuvre complexe est tel le chemin de nos vies, le chemin vers Soi.
C’est dans son abdomen que sont situées les glandes séricigènes qui lui permettent de fabriquer ces fils de soie. Ces fils sortent sous forme liquide et se solidifient instantanément au contact de l’air. C’est avec ses 8 pattes, qu’elle extrait et tricote pour former sa toile. Le 8 de l’infini, du symbole de la continuité, de l’éternité, du divin.
C’est une bâtisseuse, une architecte.
Elle maîtrise la géométrie avec perfection. Dans un premier temps, elle construit un solide fil porteur, à l’horizontal. Il va s’accrocher à un support poussé par le vent. Et chaque jour, elle le consolide, le fortifie, le double.
De ce fil suspenseur, elle déroule un deuxième fil vertical, et forme un Y, qui deviendra le centre de sa toile.
Bien alignée, au centre de l’horizontal et du vertical, à partir du Y, elle peut rayonner ! Elle se déplace avec agilité le long de ses rayons, et forme un soleil radieux. Elle pourrait se laisser griser par la perfection, s’enorgueillir d’une telle réalisation. Mais ses objectifs sont clairs. Se nourrir.
Elle repart du centre, émet un brin de soie qu’elle accroche en spirale aux rayons. Ce fil est collant et sert de piège aux insectes. Elle n’a plus qu’à guetter les sons et vibrations, du contact avec ses cordes.
Une étude de l’université d’Oxford a également montré que les araignées se servent de leur toile pour « jouer » différents sons comme avec les cordes d’une guitare. Elles peuvent ainsi contrôler la tension de la toile et détecter la présence d’une proie.
Elle s’empresse alors de l’envelopper de soie, après l’avoir tuée, pour l’empêcher de se débattre et de s’enfuir. Incapable de mâcher, elle injecte des sucs digestifs qui vont liquéfier le corps de sa victime. Il lui suffit ensuite d’aspirer sa proie prédigérée.
L’araignée au fil des cultures
Tout le monde s’accorde sur le fait que l’araignée capture ses proies grâce à la toile tissée. Mais les regards divergent selon les cultures et les clés d’interprétation. Là encore, la dualité opére ; Tantôt bénéfique, tantôt diabolique.
Dans la grêce antique, Ovide, dans les métamorphoses, parlent de ces femmes en compétition pour la perfection, dont l’une a finit par être transformée en araignée. *
L’araignée est honorée et respectée par les musulmans, qui admirent chez elles les capacité innées du filage : « l’araignée tient du merveilleux, car elle sait tout de suite filer, sans aucun apprentissage ». Al Jahid. En même temps, la sourate 29 (verset 41) du Coran met l’accent sur la fragilité de la demeure de l’araignée, et met en garde sur le fait de prendre d’autres maîtres que Dieu. **
Et si notre si légendaire spiderman, était tiré d’un conte africain !! Anansi est un homme ayant osé défier l’omnipotence et l’omniscience du Dieu Nyame. C’est pour son arrogance et son insolence, qu’il a été transformé en homme araignée, avec pour quête, entre autre, de la capture, du python, du léopard, et du frelon.
Les contes de l’araignée, furent si profondément inscrits dans les mémoires Akan que même la cruauté de la traite négrière transatlantique ne put l’effacer. Ces fables africaines ont traversé l’océan et se sont adaptés aux réalités du Nouveau Monde. En territoire hostile, les histoires d’Anansi devinrent un véritable symbole de résistance aux avanies de l’esclavage. En effet, quoi de mieux que la ruse et la maîtrise de l’art du subterfuge de notre araignée africaine comme source d’inspiration pour les captifs. ****
Dans l’imaginaire occidental, l’araignée est au centre d’une dualité évidente. Tantôt on admire l’araignée pour la beauté de sa toile. Tantôt on la craint, pour la cruauté de prédatrice. La psyché du mâle dominant, l’a associée à l’image de la femme. C’est la reine de nos fantasmes. ***
Chez ceux qui en ont la phobie, comment une si petite chose peut-elle provoquer une telle panique ? « Cet animal cristallise symboliquement l’angoisse devant le féminin », révèle le psychanalyste Jean-Pierre Winter . Ses pattes évoqueraient le souvenir archaïque de la chevelure maternelle ; son abdomen, le visage ; et la bête entière renverrait à une femme cannibale menaçant son enfant de le « manger » de baisers. Quant à sa tendance à s’éclipser aussitôt aperçue, elle rappellerait la peur que tout adulte a pu ressentir nourrisson : celle de la disparition définitive de la mère. « La toile, inconsciemment associée à l’hymen, susciterait la crainte de le déchirer ou d’être pris dedans. » Installée en son centre, l’araignée évoque la vulve, l’inconnu noir, « avec ce que peut avoir d’effrayant, dans l’imaginaire, le sexe dévorant qui retient sa proie ». Mais, la vraie panique, c’est lorsqu’elle sort de sa toile.
L’araignée comme guide
Tisse ta toile, relie toutes les facettes de toi-même,
Unis chaque partie de ton être à partir de ton centre,
Alors, tu connaîtras la paix.****
Arnaud Riou
Finalement, l’araignée n’est elle autre que le symbole de notre dualité ? Observer toutes les parts de Soi, dans ses ombres et dans ses lumières. Mettre en conscience, s’apporter de l’amour, de l’empathie, de la compassion, et affirmer que l’on fait du mieux qu’on peut. Tout cela permet d’unifier, d’aligner, et de rayonner. Cela permet à chacun d’interroger le Grand Tout, l’Univers, Dieu . De se questionner sur le sens, son lien au Sacré, au non maitrisable, à l’invisible, au Soi.
Méditation de la toile d’araignée
- Asseyez-vous dans un endroit confortable où vous ne serez pas dérangé. faites quelques profondes respirations. Débarrassez-vous de toutes les tensions qu vous encombrent. Continuez à respirer profondément jusqu’à être centré, calme, paisible et détendu.
- Imaginez un petit cercle autour de vous. Celui-ci est le vôtre, il n’est à personne d’autre. Invitez dans votre cercle le pouvoir du Grand Mystérieux, un pouvoir sans jugement, qui vous transmet uniquement de l’amour inconditionnel. Savourez ce sentiment.
- Élargissez votre cercle au-delà de votre corps, toujours centré et détendu. Invoquez maintenant les pouvoirs de l’Araignée, la grande tisseuse, pour transformer notre cercle en toile. Observez cette transformation, depuis le centre de la toile où vous vous trouvez.
- A présent, nommez votre toile – toile des relations, par exemple, de l’argent ou de l’esprit. Cette toile est la vôtre – baptisez-la et revendiquez -la.
- Examinez-la avec votre œil guérisseur. Détectez toute anomalie, toute chose prisonnière de la toile ; observez les moindres trous ou irrégularités.
- Vous allez maintenant réparer votre toile. Demandez ce qu’il faut faire pour réparer les dégâts. Vous faut-il changer de comportement ? Devez-vous relever des défis ou accepter les choses ? Écoutez la réponse et acceptez d’agir en fonction.
- Terminez votre méditation en remerciant l’araignée pour son aide.
Sources d’inspiration
http://bcs.fltr.ucl.ac.be/METAM/Met06/M-06-001-145.htm* – dictionnaires des symboles musulmans, malek Chebel** – Dieu, l’Amour et la Psychanalyse (Bayard, 2011)*** – Nofi media **** – L’oracle des animaux, Arnaud Riou*****