Ce matin, c’est une vraie purée de pois (comme on dit par chez moi) : autrement dit, il y a un brouillard épais , blanc, cotonneux, et humide, à l’extérieur. J’ouvre les fenêtres de ma maison, pour aérer l’espace intérieur. Je range, j’époussette, je fais brûler de l’encens, j’allume une bougie. J’ai besoin de lumière et d’ordre pour y voir plus clair.
Le roucoulement des tourterelles me connecte au printemps, et à l’espoir: d’un monde nouveau, d’un renouveau, de bourgeonnement. Je ressens l’appel de l’extérieur malgré des peurs tapies en moi ; si je prends mon vélo, pour aller au boulot, vais je pouvoir avancer dans cette purée de pois ? Est ce que je ne cours pas le danger, à vélo, de ne pas être vue par les automobilistes ? Mon mental mesure les risques, et se dit qu’il serait certainement plus confortable de prendre ma voiture. Mon petit hamster pensouillard, tourne dans sa roue, et a peur d’en sortir. Il fait peser sur mes épaules, des choix et des décisions à prendre.
Mais je réalise que j’ai des solutions pour être vue : les lumières de mon vélo, le jaune fluo de ma cape, et ma vigilance. Alors je prends la responsabilité d’avancer ! Et je ne regrette pas mon voyage. Mes pensées construisent des images, alignent les mots, à chaque coup de pédale, et à l’observation de chaque nouveau paysage, de chaque nouvelle sensation. Dans les hauteurs de St herblain, on ne voit pas à plus de2m de distance. Mais la confiance que j’ai construit, en me mettant en sécurité, me permet d’avancer sereinement.
Mes antennes captent diverses ambiances, atmosphère. Au fur et à mesure que je m’approche des quais de Nantes, le voile se lève un peu. Le niveau de la Loire est tellement élevé, que les bateaux amarrés, donnent la sensation d’être à quai. Ceux là, ont décidé d’une halte, d’une pause, dans cette brume dangereuse, pour leur progression. Pour les navigateurs déjà en mer, j’imagine la difficulté pour s’orienter. Pas de visibilité des étoiles, de la lune. Dans nos discussions de repas du midi au solilab, un marin aguerri, a cité le proverbe de son grand -père. Fameux adage populaire, qui nous rappelle la sagesse et l’expérience des anciens. Cela nous a bien fait rire !
Jolie brise vous caresse, quand dans la brume vous serre les fesses.
Chaque marin sait aussi, qu’il y a toujours un phare allumé, et entretenu par un autre, pour indiquer la côte. Une lumière pas toujours facile à percevoir, à peine visible, dans la brume. Qui oriente, rassure, guide, pour se mettre en sécurité. Cela fait résonance avec nos difficultés actuelles, ou se projeter est compliqué. Avec les poids de nos blessures, nos cicatrices, nos lignées, qui nous empêchent d’avancer.
Mais dans la brume, certaines personnes qui ont éclairé nos parcours. Et aujourd’hui, je pense à ma mère. Elle m’a donné la force et la détermination d’avancer. Elle m’a appris l’autonomie, l’indépendance, comme outil de liberté. Elle m’a transmis le goût de la lecture, de l’effort intellectuel de la déconstruction, de la critique, pour ne pas accepter comme vérité absolue, ce qui m’était enseigné. Elle m’a montré comment être présente pour ceux que j’ai choisi d’aimer. Quel cadeau pour ma vie, et je l’en remercie !
J’avance dans la brume, pour lever ma brume mentale. Je pose des intentions sur mes orientations, et je laisse l’histoire se dérouler, et j’observe si ma place est la bonne. Je suis en action. Comme disait un psychiatre, marcher ¾ d’h par jour, et vous verrez les choses s’éclairer.
» Puissiez vous surmonter la part obscure de la vie avec la lumière de votre âme » – Prem Tham