Protection et sécurité avec la Rue, figel

Publié le 2 juin 2025 - Paroles de plantes

Ma première rencontre avec cette plante était lors d’une balade avec mes enfants. Nous allions dans un parc près de chez nous, avec les toboggans et le sable. Au détour d’une ruelle, un petit jardin partagé. Une grande plante dépasse, et m’interpelle par son odeur. Je m’arrête, je la froisse, et je la sens. Je suis attirée par un parfum chaud et sucré. Je sens d’ailleurs que la chaleur monte à mes joues. Un peu plus tard, je suis mitigée face a l’odeur. Elle devient plus désagréable.
Pourtant, j’y reviens. J’ai envie de connaître son nom pour l’étudier. Elle m’est familière. Comme les abeilles, j’ai envie d’y rester pour butiner. Et en même temps, je me dis qu’elle est forte et qu’elle pourrait m’enivrer. Je crois qu’elle me rappelle l’odeur du figuier, sous le soleil. Je l’aime vraiment beaucoup.

Insecticide naturel, et antiparasitaire

La rue est considérée comme répulsive, et éloignerait les chats voire les rongeurs, serpents et certains insectes. Personnellement, j’observe beaucoup mon chat près de la rue dans le jardin. Ça ne l’effraie pas. Les feuilles peuvent être récoltées, séchées et emballées dans des petits sacs en tissus fermés pour servir de répulsif contre différents insectes de la maison. Plus tard, une amie tunisienne m’a parlé de figel. Une plante extraordinaire. Antiparasitaire, antispasmodique, anti-inflammatoire. Elle l’utilise souvent et en fait des infusions.

Je suis surprise, car il s’agit de la rue, ruta graveolens. Dans mes études d’herboristerie, je l’avais classée parmi les plantes toxiques. Du coup, tout ce qui est toxique, j’ai appris à m’en éloigner. Mais depuis le début du cancer du sein, j’ai fréquenté les petscan, les chimios, et la toxicité chimique. Je me dis que certaines plantes que j’avais rangé dans les dangereuses, pourraient m’être bien utiles. Dans mon jardin, près de la chélidoine qui s’est installée spontanément, j’ai mis un pied de rue. Ruta graveolens, offert par mon amie productrice, Magalie Droillard, de Tout simplement a Vertou. Elle est devenue grande et habille l’espace entre moi et le voisin. En ce moment, elle est en fleur !

C’est bon pour la digestion !

Encore des fleurs jaunes ! Y aurait il une affinité avec le plexus solaire et toutes les fonctions digestives ? Quand je la croque, elle est verte, un peu piquante, astringente. Elle fait un peu penser au pamplemousse avec une pointe d’amertume. Je la cisaille du bout de mes dents. Depuis que je l’ai sentie, j’ai son parfum en bouche. Je viens de manger. Et j’entends mon système digestif s’activer, par des gargouillis. Elle me fait roter. Ses vertus digestives, sont sans conteste, les plus rapportées. Elle adoucit les dyspepsie, acidites gastriques. En Algerie, ses propriétés antispasmodiques en font une plante idéale contre les crampes abdominales. Elle soulage les diarrhées et les coliques ;

Les feuilles de Ruta graveolens sont appréciées pour leurs bienfaits sur la digestion. Flatulences, ballonnements, indigestion ou encore brûlures d’estomac ne lui résistent pas

Affinités avec le système circulatoire

Elle me laisse en bouche, une fraîcheur, et comme un engourdissement du bout de la langue. A t’elle des affinités avec le coeur ?. Je me dis qu’il ne faudrait pas que j’en mange trop. Car elle me semble bien stimulante. Et j’ai peur qu’elle m’empêche de dormir. En effet, elle est circulatoire. Agit sur l’artériosclérose, les maux de tête, les palpitations cardiaques, la nervosité et l’hysterie. Comme céphalique c’est la meilleure des plantes ; Dans le maghreb, on applique des feuilles fraîches pilées sur le front, pour dissiper le mal de tête. Elle favorise la bonne circulation sanguine et rend les artères plus toniques. De ce fait, la plante de Rue est efficace contre les varices et les oedèmes.

Plante potentiellement abortive !

Je sens qu’elle vient aussi stimuler mes ovaires. Elle semble avoir des affinités avec le système reproducteur feminin. La feuille séchée est emménagogue. Elle va aider a activer les menstrues. J’apprendrai dans les jardins de terre vivante, lors de mon stage d’herboristerie, qu’elle est abortive. En 2008, j’étais au début de ma grossesse de mon 4e enfant. J’ai évité de trop m’y frotter, même si j’avais très envie de passer du temps avec elle. Ingérée en grande quantité, la rue peut provoquer un avortement et une intoxication pouvant avoir de graves conséquences sur la santé. La culture de cette plante, à laquelle recouraient de nombreuses femmes d’antan désespérées, fut interdite par une loi de 1921, en France. Soit dit en passant, si cette plante avait été si efficace, il n’y aurait pas eu besoin de planning familial, de contraception chimique et d’ivg. Elle aurait suffit pour réguler les naissances.

Elle était notamment utilisée pour favoriser des contractions du muscle de l’utérus et provoquer volontairement des hémorragies utérines, mais… qui pouvait tuer aussi la mère en induisant de graves troubles hépato-rénaux pouvant conduire au décès.

Philtre d’amour pour la libido des femmes

Il semblerait qu’elle soit aphrodisiaque pour les femmes, et non pour les hommes. Dans l’homme, de l’amour elle éteint les chaleurs, De la femme, au contraire, elle excite les flammes. J. Bouquet dans « L’art de conserver la santé, extrait du « Messager boiteux « . » (In : Revue d’histoire de la pharmacie, 20ᵉ année, n°77, 1932. pp. 54-56) relève quelques extraits du Véritable Messager boiteux de Berne pour l’année 1817.

L’herbe de grâce a traversé les époques, et a fait l’objet de toutes sortes d’utilisations : médicament contre la peste, plante aromatique, arôme pour l’alcool, huile utilisée en parfumerie, et même comme « filtre d’amour ».

En cuisine !

Récemment, Pierre Cajelot, paysan herboriste des gardiennes de la terre, ( à Vigneux de Bretagne) me disait qu’il mariait la rue à du fromage frais. Le piquant de la plante doit être adoucit par la fraîcheur du lait. Intéressant mélange. En cuisine, la rue est encore présente aujourd’hui dans quelques préparations à dose infime. On la trouve dans la fameuse grappa, une eau-de-vie italienne, mais aussi comme herbe aromatique crue dans certaines omelettes ou pour relever des viandes.

Elle est irritante

Dans la littérature française, la rue n’est pas une grande favorite de phytothérapie. De la famille des Rutacées, les agrumes, son huile essentielle volatile est riche en cétones, en furocoumarines, et la rendent photosensibilisante. Quand les promeneurs s’y frottent, en plein soleil, elle peut provoquer des réactions cutanées, des rougeurs, des inflammations, voire des cloques. Et pourtant, L’huile essentielle de figel est utilisée pour traiter divers problèmes de peau, tels que le psoriasis, l’eczéma ou la dermatite. Ses propriétés anti-inflammatoires aident à réduire les rougeurs et les irritations, tandis que ses vertus antimicrobiennes contribuent à prévenir les infections. Soulager les piqûres et les démangeaisons. Les propriétés antihistaminiques de l’huile de rue en font un excellent remède contre les piqûres d’insectes, les allergies cutanées ou les éruptions. Appliquez quelques gouttes d’huile diluée sur la zone affectée pour apaiser les démangeaisons et réduire l’enflure. Il y a un remède dans le poison. on peut constater que les blessures qu’elle cause par sa photosensibilité peuvent être soulagée par son huile essentielle.

Une grande plante protectrice

Si la rue sent si fort et répand une odeur aussi désagréable, c’est pour se protéger. Être mangée par les limaces, ou dévorée par des moutons, non merci. Alors elle prévient : ne me touchez pas, sinon gare ! Mickael Moore, herboriste américain, regrette qu’il n’y ai pas plus de recherches a son propos. Il ajoute a la liste des effets déjà recensés, des bienfaits dans les troubles respiratoires, affections névralgiques, maux de dents et faiblesse des yeux. Elle est utilisée en fumigations pour la toux persistante et figure, seule ou associée à d’autres espèces, dans des préparations rituelles destinées à chasser les maléfices et à conjurer Ie mauvais sort. En Afrique du nord, on l’appelle figel. Et on verra plus loin, que c’est une incontournable de la médecine arabo musulmane. Le remède homéopathique Ruta Graveolens ajoute un intérêt pour le système locomoteur : s’utilisent en cas de douleur causée par un traumatisme (chute, entorse, tendinite), de rhumatisme et de lombalgie. Les granules de Ruta Graveolens aident également à traiter la fatigue visuelle, le surmenage visuel, les yeux larmoyants et les spasmes dans les paupières.

Antipoison ET poison.

On la plantait autrefois dans les jardins de plantes médicinales, car elle servait de remède contre certains poisons. Mais on devait l’utiliser avec précaution. L’alcaloide qu’elle possède, est l‘harmaline. Elle calme les éruptions cutanées, le feu interne, les poisons. Tout est question de dosage. Car à forte dose, elle peut provoquer des vomissements et des empoisonnements. Les romains la cuisinaient pour prévenir les intoxications alimentaires. Pline l’ancien écrit que la feuille pilée avec un peu de sel guérit les morsures de serpent.

Les signes d’intoxications par la rue commencent par des troubles digestifs (douleurs, vomissements, hypersalivation) qui s’accompagnent rapidement de signes de choc (hypotension, troubles cardiaques), voire de convulsions. Il n’y a pas d’antidote à l’intoxication par la rue (Ruta graveolens ou Ruta chalepensis). La consommation d’extraits de rue même en petite quantité provoque des malformations fœtales. »

le vinaigre des 4 voleurs !

On en compose un vinaigre préservatif de toute contagion en faisant infuser des feuilles fraîches de rue (20 grammes), pimprenelle (10 grammes), bétoine (10 grammes), baie de genièvre (10 grammes), trois gousses d’ail, six noix vertes et une pincée de camphre, à prendre une cuillerée le matin et l’autre après midi. Le vinaigre dit des quatre-voleurs a à peu près la même composition.

Plante hémostatique, anti phlébite


L’huile de rue possède également des propriétés hémostatiques, c’est-à-dire qu’elle favorise la coagulation du sang. Elle peut être utilisée pour arrêter les saignements mineurs, comme les coupures ou les éraflures. Pour ce faire, il suffit d’appliquer une petite quantité d’huile sur la plaie après l’avoir nettoyée.
L’une des utilisations traditionnelles de l’huile de rue concerne le soulagement des symptômes liés aux phlébites. Une inflammation des veines souvent causée par un caillot sanguin. En massant doucement la zone touchée avec quelques gouttes d’huile de figel diluée dans une huile végétale de base. On peut réduire l’inflammation et améliorer la circulation sanguine. J’ai envie d’essayer de faire un macérat huileux solaire pour appliquer sur les varices.

Une infusion à utiliser avec grande précaution

Les feuilles de Figel s’utilisent en infusion. Avec cette équivalence 12 feuilles pour 1 litre d’eau.
Faire simplement bouillir l’eau puis ajoutez les feuilles. Laissez infuser durant 10 minutes puis filtrez. Boire au maximum 2 tasses par jour. N’hésitez pas à sucrer le tout avec une petite cuillère de l’excellent miel de jujubier.

Ne doit pas être consommé par les femmes enceintes et allaitantes. Ni par les personnes ayant de l’hypertension.

Elle chasse le « malin », le « mauvais oeil »

Les musulmans se servent des feuilles de rue pour la roqya. Bien que son efficacité soit avérée dans l’exorcisme légiféré, son usage ne se limite pas à cette pratique. Celles-ci incarnent un véritable moyen de chasser les djinns, action essentielle pour mettre fin au sihr. Les graines d’harmal sont utilisées en Turquie pour « chasser le mauvais oeil ». Cette plante dégage une odeur insupportable qui ne leur laisse pas d’autres choix, à part fuir.

Sources – Altheaprovence, floramedicina, médecine prophétique,