Quand l’invité frappe à la porte, on lui demande gentiment de rester dehors. Il n’est pas le bienvenu. Il est indéfinissable, il échappe aux cases de notre compréhension. Depuis 2 ans, il fait le buzz, il est à la une de toutes les actualités, et quand on prononce son nom, un blocage s’opère. Il suscite peur, angoisse, inquiétude, tristesse. Il sépare et divise les familles, les amis, les collègues. Il rend malade; et si par malheur, il envahit … il épuise les réserves d’oxygène, et provoque le deuil.
Quand je le décris ainsi, j’ai l’impression de parler de cette plante qui effraie, et envahit les arbres affaiblis. Le gui, viscum album. Une plante extraterrestre … la graine s’installe sur une branche, et plonge dans le rameau, pour prélever dans la sève, l’eau et les minéraux. Mais ses ramifications sont vertes ; ce qui lui permet de se nourrir aussi grâce à la photosynthèse. C’est une hémiparasite. Ce qui est déstabilisant avec cette graine, c’est qu’elle n’est pas soumise aux mêmes règles que toute graine. D’habitude, ces dernières développent une racine pour s’installer dans la terre, et une tige, pour se dresser vers la lumière. Dans le cas du Viscum album, la graine se développe en faisant pousser vers le haut comme des suçoirs, qui vont redescendre sur la branche vers les parties sombres du rameau. Elle a un phototropisme négatif. Elle pousse donc dans tous les sens. Et forme une boule, dans laquelle on a pû constater une température plus élevée au centre. La toxicité du gui dépend de l’hôte sur lequel elle se trouve. Sur le peuplier, il est moins toxique que sur le pommier.
Ca ne vous rappelle pas certaines caractéristiques de notre invité non désiré ? Il n’agit pas de la même façon sur tous ses hôtes ! C’est un extraterrestre, venu d’on ne sait ou, qui fait couler beaucoup d’encre, et alimente le mystère. Avec lui, il faut faire preuve d’ingéniosité ! Car il se propage tellement vite, que les puissants de ce monde, ont décidé d’isoler la population, pour la protéger. Et ensuite, pour lui permettre de circuler librement, ils ont incité au vaccin, et contrôlé les entrées. Une nouvelle star s’est affichée dans l’univers : le pass. A en oublier, la maladie, les gestes barrière, l’hiver, l’affaiblissement du système immunitaire. Immunité !! vous avez dit immunité ? Moralité : l’invité force le passage, au premier coup de froid, et s’invite dans les foyers. Pas d’inquiétude. La courbe est stable, et l’invité est maitrisé ! Pourtant, vous devez vous isoler avec lui !! Pas le choix, pour protéger l’humanité. Vous êtes obligés de le fréquenter, de supporter sa toux, ses crachats, ses picotements de gorge, sa fatigue, son épuisement. Comme pour le gui, il agit différemment avec chacun de ses hôtes. A croire qu’il préfère les hommes aux femmes, chez nous. Certains sont positifs, d’autres sont négatifs, alors qu’ils mangeaient dans la même assiette, et échangeaient de doux baisers. Certains sont asymptomatiques, d’autres crachent leur poumon, d’autres se mouchent, d’autres ont de la fièvre.
C’est alors le moment de se transformer en aide soignante, en infirmière, en professeur, en ambianceuse ! Demandez le programme ! Une petite diffusion d’huile essentielle de ravintsara, en alternance avec du laurier noble. Ouverture des fenêtres en grand, toutes les 3h ; contrôle régulier de l’oxygénation, en pinçant le majeur gauche dans l’oxymètre ! Sans parler des litres de tisane, distribuées à chacun : décoction d’aunée et de cannelle, avec infusion de laurier. La recette sénégalaise prend le relais, avec ses clous de girofle, son kinkeliba, son gingembre, son citron. La concurrence fait rage, et les invités n’ont qu’à bien se tenir s’ils ne veulent pas partir. Les gorges raclent, les nez se mouchent, les poumons toussent… L’extracteur de jus n’a jamais aussi bien marché : pommes, carotte, racine fraiche de gingembre, citron. On essaye de bannir les produits laitiers de vache, et de les remplacer par des laits végétaux, des produits de chèvre et de brebie. On mange des légumes, on se complémente en vitamine D, on boit de l’eau pour s’hydrater, et on se repose. Un vrai marathon, pour dégager l’invité non désiré. Toutes les stratégies sont bonnes pour l’éjecter. Le plus dur, c’est que les positifs ont le droit de sortir dans 10jours. Maintenant qu’ils l’ont eu, ils sont immunisés. Quant aux négatifs, ils sont condamnés à surveiller la venue des premiers symptômes : 10jours d’isolement + 7 jours d’incubation. Avec un peu de chance, l’invité accueille son copain, 3 jours après. Rebelote. On joue alors les prolongations !
Vivement le moment, ou on pourra à nouveau s’embrasser sous une branche de gui, pour se souhaiter la bonne année, et s’aimer en toute tranquillité !!